communication (les marchés de la)

 

Si l'on considére que l'information est une marchandise comme tout autre bien ou service présent sur le marché, rien ne justifie que le secteur de la communication échappe à la dynamique capitaliste globale. Comme les autres secteurs du système capitaliste, le monde de la communication se développe à travers trois lignes de force: concentration, diversification et internationalisation. La période récente est surtout marquée par l'apparition de grands groupes de communication qui intègrent en leur sein aussi bien du contenu (information, mais aussi fiction) que les moyens de diffusion.

La commercialisation de l'information

L'information est une notion extrêmement récente. Surtout elle a pris un sens où elle s'intègre au processus général de commercialisation des biens et services. Dans la logique du système capitaliste, l'information ne bénéficie d'aucun statut dérogatoire et sa valeur ne se mesure qu'en fonction de celle que lui donne le marché. La valeur de l'information provient aussi de son rapport au temps. Plus une information date et moins elle a de valeur (à ne pas confondre avec le sens).

L'agence Havas

Dès 1834, Louis Havas crée une agence de presse, la première au monde. Havas met en forme et vend de l'information comme d'autres vendent des produits agricoles. Ainsi, Havas transforme et fournit une matière première aux autres médias (à la presse en l'occurrence). Précurseur, Havas annonce toute l'évolution du secteur des médias.

La concentration des groupes de communication

L'après-guerre est marquée par deux phases de concentration. La période 1950-1985 constitue une phase de concentration relative et encadrée par différentes lois qui visent à empêcher toute constitution de trust pouvant menacer le pluralisme.

Un environnement favorable à la concentration

En revanche, depuis le début des années 1980, la stratégie appliquée par les groupes bénéficie d'un environnement institutionnel et technologique particulièrement favorable. Cette deuxième phase se place sous le signe de l'intégration verticale, du mélange et de la recherche d'alliances.

L'éclatement d'AT&T en sept entreprises de communication locales, les Baby Bell, marque en 1984 le début du mouvement de déréglementation aux États-Unis. Les décisions prises par le Congrès en décembre 1995 (autorisation accordée aux compagnies de téléphone de distribuer de l'image et aux câblo-opérateurs de vendre de la communication téléphonique; augmentation du seuil d'audience maximale d'une chaîne de télévision de 25 % à 35 %...) constituent le point d'orgue de ce mouvement.

En Europe, la logique est identique. Même si la logique de quota de diffusion de produits nationaux subsiste, le "Grand Marché unique" implique la fin de la notion de monopole public et l'internationalisation toujours plus forte des contenus.

À cela s'ajoute une transformation profonde des conditions technologiques: la compression numérique, en ce qu'elle permet de faire passer sur un même réseau du son, du texte et de l'image, démultiplie l'offre potentielle de programmes. L'axe stratégique s'est déplacé du véhicule, la ligne téléphonique ou le canal de diffusion, vers le contenu, la création comme le catalogue de droits.

1995, l'année des concentrations

La constitution de "majeures majors" est la marque des années 1990. Chronologiquement, la première fusion d'importance intervient en 1989, avec le "mariage" de Time et Warner. L'année 1995, voit une forte accélération de ces fusions avec les mariages Disney/ABC et Time-Warner/CNN, le rachat de CBS par Westinghouse. Il s'agit dans les deux premiers cas d'une alliance entre des fournisseurs de contenu et des diffuseurs. Par exemple, Disney, spécialiste de la fiction et des dessins animés pour enfants et adultes, s'allie avec l'un des principaux propriétaires de réseaux de télévision. Mais ces alliances restent le fait d'acteurs traditionnels. En revanche, la prise de participation, toujours en 1995, au capital de News Corp, par la deuxième compagnie de télécommunication américaine, MCI, marque l'entrée du monde des télécommunications dans le jeu des médias. MCI apporte son savoir-faire et sa clientèle à News Corp qui dispose à la fois de centres de production (presse, TV...) et de réseaux satellitaires.

Une même dynamique en Europe

Les groupes européens ont mis en place une stratégie équivalente. Si les grands groupes américains disposent tous de l'un des quatre réseaux nationaux de télévision, chaque conglomérat européen part d'une base locale où il est en position de force. Il en est ainsi de Fininvest, propriétaire de l'ensemble des chaînes de télévision italiennes privées, de Kirch, détenteur du premier catalogue de droits de fiction au monde, avec plus de 80?000 heures en stock, ou encore de Hachette, numéro 1 de la presse magazine en France.

La réorganisation européenne de l'industrie de la communication ne fait qu'accélérer la concentration de l'écrit et des autres médias en Europe.

Les multiples accords pour lancer des bouquets de programmes numériques (en particulier celui signé entre News Corp, Bertelsmann, Canal + et Havas pour lancer une série de chaînes numérique, vers l'Allemagne) est un signe supplémentaire de la concentration des entreprises de communication en Europe et du rôle croissant des groupes américains sur ce marché.